Il avançait à grandes enjambées sur la route, une haute silhouette dans la lumière tombante du soir. Entouré d'une grande cape de voyage il ressemblait à une ombre mouvante sur le chemin. Il était plutôt grand (1m80) et malgré le volumineux bagage que l'on voyait dans son dos, sa démarche souple et silencieuse laissait deviner une agilité inattendue pour une personne autant équipée et dont la large carrure pouvait faire penser à un bûcheron. Toutefois la large poignée d'une lame dépassant de son épaule gauche accolée à la pointe d'un arc long évoquaient un autre métier.
Sur le grand vêtement de voyage, qui devait être d'un cuir épais, pouvait se voir, cousu de fil rouge, un large cercle entourant une colline. Au sommet de la colline se dressait un arbre dont le tronc n'était que des lames qui se mêlaient peu à peu en un feuillage d'un rouge plus sombre. C'étais là l’emblème de l'un des clans barbares des grandes plaines de l'Aruc mais nous reviendrons sur ce sujet plus tard.

Levant la tête, l'homme aperçut au loin sa destination le grand château du duc d'Orzaal se dressait a l'horizon. Les habitants de la région semblaient avoir de l'estime pour ceux qui occupaient cette demeure, aussi s'y dirigeait-il sans trop savoir pourquoi. Il continua donc sa marche commencée il y a des années déjà, peu après que, levant son épée, il en avait vu perler le sang de Branriamce l'alagaï. Ce titre signifiant a la fois "celui qui dirige" et "celui qui connait les anciennes coutumes" lui aussi l'avait porté, autrefois il était Ul alagaï oste kupo littéralement "le véritable meneur de la troupe du vent". Désormais loin des siens, il était seulement Kupo le vent.
C'est ce nom qu'il avait adopté une fois s'être vengé de la souillure qu'avait introduit Branriamce à l'Iktonschran, apposée au bras gauche de tout grand guerrier des plaines quand celui-ci est capable d'influer un élément. Pour Kupo, la découverte de son affinité avec l'air entraîna immédiatement l'octroi du symbole de pouvoir car il était déjà un guerrier reconnu et puissant, trop puissant. Envieux, Branriamce modifia le tatouage de sorte que chaque fois que son porteur se trouve dans ses plaines natales, il est pris de frénésie meurtrière. C'est pour éviter de massacrer encore les siens que Kupo avait du partir en errance. Il traversa de nombreuses contrées sans trouver ce qu'il cherchait sans toutefois savoir si réellement il pouvait le trouver :la paix.
Et c'est ainsi qu'il arriva à la porte du manoir d'Orzaal juste après la tombée de la nuit. Il frappa à la grande porte.

La nuit était tombée depuis peu. Les habitants du Manoir venaient pour la plupart de terminer leur repas et tous retournaient à leurs occupations afin de terminer leurs diverses activités débutées avant d'aller se coucher à des heures tout aussi diverses. Pour ma part, je m'ennuyais ferme. Par une jolie journée du Temps Verdoyant, une fois que le soir a emporté le soleil, il ne reste pas grand chose à faire ! J'avais passé le plus clair de ma journée au dehors, aidant Chana à décharger une nouvelle cargaison d'herbes et d'épices diverses puis à en essayer les saveurs, assises toutes deux au grand air, à la terrasse de la taverne, préparant un nombre incalculable de tasses de thé jusqu'à plus soif, testant les différents arômes avec délectation, ravies d'avoir une bonne excuse pour siroter de délicieux breuvages sous les rayons chaleureux de l'astre diurne. Cette après-midi terminée, je bullais donc dans la salle d'armes, au dessus du Dojo, découvrant les nouvelles folies créatives de notre forgeronne - des objets non-identifiés tranchants pour la plupart, dangereux pour la totalité - quand des coups frappés à la grande porte résonnèrent avec force. L'ensorcellement de la lourde porte en bois massif avait été réalisé avec soin par Amras qui avait enchanté le heurtoir de manière à ce que chaque personne dans le Manoir puisse en entendre les coups, où qu'il se trouve et quoi qu'il fasse. N'ayant rien d'autre à faire, et poussée par la curiosité, je reposai l'espèce de lance/crochet/masse/truc-plein-de-piques avant de rejoindre la porte. Je tirai le battant et découvris alors l'étranger qui avait frappé. Je ne discernai tout d'abord que sa haute silhouette lourdement chargée de bagages et d'armes dans la pénombre, mais une lumière du couloir allumée d'un claquement de doigts éclaira son visage que je pus détailler à loisir.

Spoiler:

"Auriez vous l'amabilité de me conduire à votre maître ?"

Le mot "maître" me fit tiquer. Le jour où je considérerais quelqu'un comme mon maître n'était pas prêt d'arriver ! Je le détournai aussitôt de son erreur :

"Je suis Lucyll Freespirit, conseillère et amie du Duc d'Orzaal. Je peux vous le faire rencontrer bien sûr, il doit se trouver dans son bureau en ce moment même. Attendez un instant."

Je sortis de ma poche un petit pliage de papier qui, en se dépliant, figurait un oiseau sous forme d'origami. Encore une invention de notre enchanteur attitré pour faciliter la communication dans l'immense demeure. Je notai un petit mot annonçant l'arrivée du voyageur à l'intention d'Ergaïl puis soufflai dessus et le volatile de papier s'envola vers son destinataire. Ces petits charmes tout simples étaient d'une grande aide, et on apercevait nettement moins de gens essoufflés dans les couloirs depuis qu'ils avaient été mis au point. Puis je me tournai vers notre invité.

"Si vous voulez bien me suivre... Nous pouvons aller à sa rencontre et en profiter pour déposer vos... affaires, dis-je en fixant les armes qui dépassaient de ses épaules, afin de vous débarrasser un peu. Vous avez faim ?"

Je l'entraînai à ma suite, l'invitant à poser son épée, son arc, et le reste de son paquetage dans l'antichambre qui jouxtait le couloir.

[Oui, un jour, l'INSA aura conquis le monde (si ce n'est déjà fait) !! Et le monde entier sera soumis à notre incroyable connerie (financée par les fûts de bière intarissables du Foy') !! Muhahahahaha ! Hum, pour compléter ce portrait de notre Rantanplan national, ajoutons qu'il possède la collection complète des oeuvres de Myazaki, qu'il imite Totoro à la perfection, que ses cheveux trop longs rétrécissent avec des shampoings magiques, qu'il a accroché une épée bâtarde à la poignée de sa fenêtre, qu'il a perdu à notre dernière bataille navale à trois en amphi de cristallographie, qu'il m'a fait manger un chocolat au miel absolument exquis que je n'arrive pas à retrouver malgré tous mes efforts, que ses fonds d'écran sont géniaux, que Glenderin lui pique régulièrement sa guitare pour jouer la musique de Tetris dessus, qu'il écrit tellement grand qu'il a besoin de trois pages pour copier ce que j'écris en une seule, qu'il me trouve petite, qu'il porte des boxers TRES colorés (comment suis-je censée savoir ça ?) et qu'il ne sait pas la différence entre le son "é" et le son "è".]